Jean-Philippe GIRARD, président de l’ANIA a présenté ce matin lors d’un point presse le bilan économique 2017 de l’industrie alimentaire et ses perspectives 2018.
Les entreprises alimentaires ont continué en 2017 de subir de plein fouet les effets de la guerre des prix, encore amplifiés par des négociations commerciales 2017-18, extrêmement difficiles malgré les Etats généraux de l’alimentation (EGA).
Dans ce contexte tendu, le secteur démontre néanmoins sa capacité de résilience, notamment sur l’emploi.
En 2017, le secteur agroalimentaire conserve sa position de leader de l’industrie française avec ses 429 079 emplois directs (+4 491 emplois par rapport à 2016) et un chiffre d’affaires (CA) de 180 milliards d’euros (+3,9 % vs 2016). Néanmoins, cette augmentation de CA, fortement alimentée par une dynamique à l’export redevenue favorable et la hausse des matières premières alimentaires (+12%), est à relativiser par rapport à la tendance observée dans le reste de l’industrie (+5,8%).
L’export reste une opportunité majeure pour les entreprises, il représente 21% de leur CA, pour un excédent commercial de 7,6 milliards d’euros (+4 % vs 2016). La France réussit ainsi à se maintenir en 4ème exportateur mondial derrière les Etats-Unis, l’Allemagne et les Pays-Bas. Il existe néanmoins une forte marge de progression quand on observe que cette dynamique n’est portée que par 20% des entreprises (contre 80% en Allemagne).
Ces bonnes nouvelles en matière d’emploi et d’export ne sauraient masquer une réalité économique et financière globale qui se détériore, notamment au regard du reste de l’industrie.
On assiste en effet en 2017 à une forte baisse du taux de marge des entreprises alimentaires (- 6 points en 10 ans) pour atteindre son plus bas niveau depuis 40 ans, et une production qui continue de reculer (-0,4% après -1,3 % en 2016 vs +2,2 % dans le reste de l’industrie). En parallèle, les prix des produits de grande consommation alimentaire ont continué de reculer, pour une baisse totale de près de 4 points entre 2014 et 2017.
Une destruction de valeur liée directement à la guerre des prix que se livrent les distributeurs et qui représente une perte de près de 4 Md€ pour la filière alimentaire depuis 2014. Cette année n’a pas fait figure d’exception, malgré les EGA et la signature d’une charte en novembre par tous les acteurs, avec une poursuite de la guerre des prix et des promotions qui a continué d’affaiblir dangereusement la situation financière des entreprises alimentaires et des agriculteurs.
Tout cela, sans relance de la consommation et sans impact sur le pouvoir d’achat des ménages :
- La consommation continue de ralentir cette année, s’inscrivant à + 0,8 % (contre +1.4% dans le reste de l’industrie)
- Le pouvoir d’achat ne se joue donc pas dans le caddie du supermarché, qui aujourd’hui représente moins de 10% du budget des ménages !
Négociations commerciales 2018 : malgré les EGA et la charte, aucun progrès !
Cette année encore le climat des négociations s’est avéré catastrophique. Ainsi, selon le dernier Observatoire des négociations commerciales de l’ANIA, au 5 mars 2018 :
- 90 % des entreprises consultées avaient besoin d’une hausse de tarif afin de conduire leur stratégie commerciale
- Mais 47 % ont finalement signé en déflation et si 37 % ont obtenu une modeste hausse de tarif, elle reste toutefois bien éloignée de leurs besoins !
Mettre fin à une situation qui met en péril l’industrie alimentaire française et son amont agricole, avec un projet de loi pour enfin rééquilibrer les relations commerciales et permettre à tous les acteurs de la filière de vivre de leur travail !
Dans le prolongement des discussions des EGA, les entreprises alimentaires sont plus que jamais en attente du projet de loi actuellement en discussion au Parlement et qui doit enfin rééquilibrer les marges sur l’ensemble des produits alimentaires dans le but de recréer de la valeur pour tous les acteurs de la filière, au bénéfice du consommateur.
Cette nouvelle loi est nécessaire mais elle doit aussi s’accompagner d’un renforcement des contrôles et des sanctions.
Des sanctions dissuasives qui doivent permettre un rééquilibrage du rapport de forces dans les relations commerciales tout au long de la chaîne. Car aujourd’hui les amendes prononcées à l’égard des distributeurs ne sont nullement dissuasives, encourageant même les mauvaises pratiques.